Le numéro 4 de la revue en ligne Le Tour critique se voudrait l'occasion d'une interrogation pluri- voire trans-disciplinaire sur le champ scientifique que désigne le vocable « cognitivisme ». D’emblée les questions sont multiples, du fait de la diversité des approches que ce numéro sollicite, du fait des objets ou des relations qui pourront être retenus dans les différents travaux, du fait du pluriel des sciences cognitives rassemblées sous le nom de cognitivisme. Cette polyphonie est du moins la gageure de ce numéro. On y trouvera des questionnements à l’intersection de l’épistémologie et de l’histoire des sciences. Ils permettront d’éclairer les conditions d’émergence du cognitivisme, les facteurs de son extension, ses liens avec la technologie, les modes de son entrecroisement avec des champs disciplinaires connexes parmi les sciences humaines tels que la psychologie, la sociologie, la linguistique, voire de redéfinition de ceux-ci. Il y aurait également à interroger son statut de « nouveau savoir », son lien avec le positivisme, avec les modélisations des sciences de la nature, les procédures discursives, textuelles, ou institutionnelles par lesquelles il se constitue comme tel. Si l’approche épistémologique de l’inscription du cognitivisme dans l’histoire des sciences est un éclairage majeur, il y aurait aussi à interroger les modes sur lesquels sont convoquées dans les ouvrages où le cognitivisme s’élabore, l’histoire des sciences, ainsi que les autres champs des sciences humaines. Les points de contact, voire d'intersection entre la philosophie et le cognitivisme sont également nombreux ainsi qu'en attestent les ouvrages consacrés au développement d'une philosophie de l'esprit. Comment les héritages de pensée, les ruptures, les réappropriations opèrent ils ? A la faveur de quelles élaborations conceptuelles et selon quels enjeux ? Autour de quels concepts et enjeux majeurs peut-on articuler les différends entre une philosophie de l'esprit adossée aux neurosciences et la théorie psychanalytique ? C’est aussi la question de l’acquisition des connaissances et de la pensée de l’individu qu’elle construit qui pourra être placée à l’intersection de perspectives diverses. Quel débat y a-t-il aujourd’hui en psychologie ou dans les sciences de l'éducation par exemple autour de l’acquisition du savoir, de la réalisation de la connaissance, par l’enfant ? Comment les termes « acquisition », « connaissance », « savoir », « enfant » sont-ils construits ? Comment sont-ils articulés à la question du sens ? Quelle part est faite à la subjectivité, à la dimension du singulier, au contingent, à l’imprévisible dans ces approches de la « cognition »? Comment sont représentées les activités mentales et quels sont les liens entre les activités mentales, corps et langage ? Quels sont les modèles et formalisations qui les informent ? Quelle est la place faite à l'hétérogène, à l'altérité dans ces modèles? Il serait également important d'interroger ce qui se joue à ce que ce « nouveau savoir » soit emprunté, se voit donné une place, dans le champ de la critique littéraire voire de l’esthétique, tant dans la prise en compte de la fiction que de la réception. Comment ces emprunts opèrent-ils ? Quels sont leurs effets et leurs fins? Selon quels modes le texte littéraire, sa portée esthétique et les enjeux d'interprétation qui lui sont propres sont-ils convoqués dans ces pratiques de lecture ? Comment le savoir de la littérature, l’interprétabilité du texte viennent-ils interroger cette approche cognitive de l’œuvre littéraire ?
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