L’enfance, l’enfant, l’infans, l’infantia, l’infantile….
Les vocables qui se rapportent à « l’enfance » sont nombreux et en aucune façon interchangeables, car les disciplines ou les champs épistémologiques dans lesquels ils sont convoqués en font entendre des acceptions très contrastées, voire opposées, contradictoires. Il n’est pas rare que cette disparité, cette friction se rejoue à l’intérieur d’un même champ épistémologique, que ce soit la philosophie, l’histoire, la sociologie, la psychanalyse ou les dites sciences de l’éducation. Concept relativement tardif, ainsi que le souligne Hannah Arendt, émergeant conjointement aux questions soulevées par l’apprentissage des connaissances et par l’éducation, il se situe d’emblée à la croisée des champs disciplinaires des sciences humaines et des modèles interprétatifs que ceux-ci présupposent et élaborent, au point qu’on a parlé d’ « invention de l’enfance ». Si bien qu’à la fois, il cristallise les enjeux qui ont été liés aux promesses émancipatrices de la modernité, selon les divers discours et les institutions qui les ont portées, et tout autant réfracte les questionnements et les perspectives critiques sous lesquels ces mêmes promesses ont été interrogées. Loin d’être homogènes, ces perspectives critiques et ces remises en jeu du concept, elles-mêmes historiquement déterminées, ont constitué des points d’intersection entre les différents champs des sciences humaines, ou entre différentes œuvres à l’intérieur d’un même champ comme dans le cas des œuvres de Foucault, Derrida ou Lyotard pour la philosophie et Freud, Winnicott, Ferenczi pour la psychanalyse.