Jacob's Room : appeler un nom

Chantal Delourme

Résumé


L’appel du nom de Jacob, qui résonne tout au long du roman nous semble être traversé des enjeux politiques, éthiques et esthétiques qui caractérisent ce texte où s’esquisse de façon singulière la poétique de Virginia Woolf. L’article se propose de les aborder sous trois angles, à travers lesquels la question de l’adresse est poursuivie tant au niveau de la diégèse que de la narration. Le fait que Jacob soit souvent situé hors du champ de l’appel de son nom, alors même qu’il répond de son nom en choisissant un objet allégorique de la vanité, fait de sa mort sur les champs de bataille et des forces historiques qui lui sont rapportées un symptôme de l’extinction des noms par l’histoire et de ce que J. Derrida appelle la pervertibilité des formes démocratiques. Mais de nombreuses façons, le récit, dans les effets d’adresse de l’idiome amoureux, ainsi que la régie des voix, qui fait entendre le tort qui est fait au nom, en appellent au nom. Enfin le motif élégiaque de la pierre parlante, qui circule tout au long du roman, nous invite à considérer comment il est répondu, jusque dans la dernière page, du nom de celui qui n’est plus et à suivre le destin de la prosopopée.

Jacob’s name is repeatedly called in the novel and its insistent reverberations alone bear witness to the political, ethical and aesthetic issues related to Virginia Woolf’s singular poetics in this text. This paper approaches this mode of address in the diegesis as well as on the narration level from three perspectives. Jacob’s recurrent absence to the scene of address, while he accounts for his name by electing the emblem of Vanity, makes of his death on the battlefields and of the historical forces that weigh upon him a symptom of the extinction of names and of what J. Derrida calls the pervertibility of democratic forms. However, the narrative never tires of appealing to the name in numberless ways among which the modes of address of the idiom of love or the handling of voices which testifies to the wrong being done to Jacob’s name. Lastly the elegiac motif of « speaking stones » which runs throughout the text down to its ultimate variation in the last page invites us to consider how one bears responsibility for the name of he who no longer is and to trace the trajectories of prosopopoeia.

 


Mots-clés


Appel; Réponse; Nom; Pervertibilité; Prosopopée

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